L'action d'autres forces

2.2  Mis à part les organisations politiques, d’autres forces,  expression du mouvement identitaire, un mouvement bien plus large que le mouvement national, ont contribué ou contribuent à l'émergence des couleurs rouge-vert-noir du fait de leur profonde signification.

       2.2.1 Ces autres forces sont souvent des mouvements sans-parti, des composantes de la société civile

Djo DESORMEAUX, au début des années 1970, publie des disques, notamment celui sur le 22 Mai (Pli bel dat - Misié Chelchè), en affichant les couleurs rouge-vert-noir sur la pochette.

 

L’AGEM (Association Générale des Etudiants Martiniquais) publie, en 1978, le journal « Pou Jou Wouvè » qui popularise le drapeau dans l’émigration (notamment étudiante), et aussi en Martinique (durant le temps des grandes vacances).

 


Le rouge-vert-noir sont les couleurs du Club Mairie Sportive qu’on connait bien pour son équipe d’athlétisme, à laquelle il faut ajouter aujourd’hui l’équipe de Volley-ball féminin. Foot-ball et cyclisme sont en sommeil pour l’instant. Le club est né en 1962. Au début, Pratiquement tous les adhérents sont employés à la mairie et militants ou sympathisants PPM. C’est cette influence qui explique certainement l’adoption des couleurs.

Le logo de la Mairie sportive en 1989.

« (…) Nous avons choisi ces couleurs car elles sont celles que CÉSAIRE voulait pour le drapeau de la Martinique.

 

 

Christian EDMOND-MARIETTE


A BÒKANNAL, Niko GERNET (Entretien du 01/07/16) nous dit qu’en fait le rouge-vert-noir sont « les couleurs du quartier ».

* En 1975 nait l’ASJ BÒKANNAL, sur une idée de Maurice ENNETTE et sous l’impulsion de Laurent DOMI, Niko GERNET, Claude LARCHER, Victor TREFFRE. Nous sommes dans la foulée de Janvier-Février 1974 et la revendication identitaire et nationale se développe. Les couleurs choisies pour l’équipe sont le rouge-vert-noir. Cela n’a pas posé de problème dans le quartier car il s’agit de personnes et d'une sensibilité très enracinées dans le quartier. 

* Depuis 1975, Kannaval bòkannal (qui est devenu TANBOU BÒKANNAL) arbore le rouge-vert-noir. Ce sont les couleurs de ralliement : pour s’intégrer au vidé, on porte un brassard, un tricot, bref une partie de la tenue vidé en rouge-vert-noir. Après 1985, avec l’adoption des costumes, on utilise occasionnellement du jaune doré, du gris argenté, du blanc, mais le rouge-vert-noir reste le noyau de base sous une forme ou une autre.

* Il faut mentionner aussi le club de pétanque du quartier qui existe de longue date. Le port du rouge-vert-noir semble être lié davantage à l’influence du PPM.

* D’autre part, en Mai 2007, le Konvwa pou réparasyon avait hissé un drapeau rouge-vert-noir sur l’école Marcel Placide. Il n’a disparu qu’après le passage de DEAN (17 août 2007).

 


Dans la littérature,  il y a la parution,  en 1978, d'un ouvrage "Cri et société - Littérature antillaise de combat (choix de textes)", présenté par Auguste ARMET, Lucien CIDALISE MONTAISE, Henri MELON, Maurice OREL, Xavier ORVILLE, Yves PADOLY, Michel PONNAMAH, Claude ROSEMAIN. La couverture arbore les couleurs rouge-vert-noir sous la forme de rectangles verticaux et horizontaux s’emboîtant.

Un texte collectif, en page 21, reprend un poème d'Auguste ARMET " intitulé Bréviaire/Boutou grand soir" (en p. 181) qui dit ceci : (...)

"Je n'ai d'autre ambition 

Que le Vert-Noir-Rouge pour Demain, Après-Demain,

Dans vingt ans peut-être (...)

Éléments retrouvés à partir des précisions apportées par Auguste ARMET, lors du débat  

Les combattants de danmyé (Anciens et jeunes), pour la plupart organisés dans l’AM4 durant les années 1980 et 1990, adoptent, dès les années 1980, le Rouge et Noir comme couleurs du danmyé. Ils fondent cela sur la signification spirituelle, culturelle et historique de ces couleurs. Citons :

(…) « Les couleurs ne sont pas fortuites. Le rouge et le noir sont deux couleurs présentes de façon hautement symbolique dans les mythes et les cultures du monde noir, de l’Égypte antique aux Caraïbes, en passant par l’Afrique noire subsaharienne.(…)

Nous inspirant de tout cela, nous pouvons énoncer la symbolique de notre dikanman.

Le noir est le symbole de l’Humain, être de culture. (…) Le rouge (à l’échelle universelle d’ailleurs) est la couleur de la force de vie, de la force de réalisation, de la victoire, de l’espoir, de la volonté de progrès. C’est le balan lavi-a.

22 mai 1997, 77 personnes dont, entre autres, Edouard GLISSANT, Jean BERNABE , Christian BASELTO, Patrick CHAMOISEAU, Camille CHAUVET, Roland LAOUCHEZ, Victor PERMAL, signent et publient un texte : « Rouge Vert Noir Trois couleurs pour un drapeau ». 

 

Durant le Mouvement populaire de février-mars 2009, les couleurs s’affirment chaque jour et de multiples façons :

* Le drapeau flotte sur l’Atrium, la maison des syndicats, devant les grilles de la préfecture et accompagne les défilés.

* Il est porté par de nombreux manifestants sur leurs tee-shirts ou/et sur leur voiture (badges)

* Le 14 mars, à la soirée culturelle de clôture, « Moun lakilti » déploie un immense drapeau en fond de scène.

 

Le 1er mai 2009, le drapeau accompagne le défilé des travailleurs. A cette occasion, le PCM distribue un tract où sont utilisées les trois couleurs (non associées en drapeau). Mais il n’y a pas eu de suite.

 

Le « Konvwa pou réparasyon » de mai 2009 a été l’occasion d’une sortie massive du drapeau, et notamment lors de la dernière étape reliant Saint Pierre au Prêcheur qui a rassemblé près de 2000 personnes.

Suite au mouvement de 2009, Joslen JONAZ réalise un documentaire de 52’ d’un très grand intérêt « DRAPO MARTINIQUE », diffusé par Internet. Vous y retrouvez des interviews de Christian BASELTO, Marcel BOURGADE, Edourd DELEPINE, Djo DESORMEAUX, Francis CAROLE, Alex FERDINAND, Victor LESSORT, Garcin MALSA, Robert SAÉ... Et puis, à travers les éditions NÉCESSITÉ, il développe plusieurs actions durant lesquelles sont brandies les couleurs rouge-vert-noir : les journées de l’Identité en mai 2015 et 2016, l’hommage à Armand NICOLAS en mars 2015 et la publication des livres d’Armand NICOLAS.


L’Association KANNIGWÉ, dans la foulée du mouvement de 2009, organise, le 16 avril 2009, sa swaré DKB. Deux grands drapeaux sont présents au marché de Fort-de-France lors de la swaré dédiée au Mouvement de février-mars. Depuis, le drapeau est présent à chaque swaré bèlè de l’association et sur son site également. Daniel VALLEJO, président de KANNIGWE, explique que, après discussion du thème, de la représentation « drapo Malsa », et apports d’éléments historiques,  « le choix du rouge-vert-noir est apparu de façon tout à fait naturelle ».

En décembre 2015, l’AM4 (Association Mi Mes Manmay Matinik) œuvrant pour le danmyé-kalennda-bèlè) prend une motion à l’unanimité où elle adopte officiellement les couleurs rouge-vert-noir. (cf Pou alé pi lwen - Autres 5)

Le logo du Bureau des Etudiants de l’IFMES utilise les couleurs bleu-blanc-rouge. Cependant, en juin 2015, le Conseil d'Administration de l’association, à l’occasion de la rédaction du bulletin de l’association  (portant notamment sur la culture, avec la problématique d’inscrire leur activité dans la culture martiniquaise et dans ses formes symboliques, de réactiver la valeur de l’identité, à la base de l’activité), le CA décide donc d’adopter le rouge-vert-noir comme couleurs du bulletin. Décision est prise aussi de mettre la modification du logo à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale. Diffusées en interne et en externe, les nouvelles couleurs n’ont pas posé de problème particulier.


De son côté, Coordination Lawonn bèlè, après une année de préparation, adopte, dans le cadre de la préparation du Bèlè Djouba - Festival bèlè Matinik, son logo (à l’unanimité de la réunion générale du 10 janvier 2016), dont le noyau est constitué des couleurs rouge-vert-noir.

Et puis, il y a une diffusion de plus en plus importante sous forme d’autocollants, de tricots, de dikanman, sur certains sites et pages facebook… 

Notons tout particulièrement la ligne MADFACE qui diffuse le rouge-vert-noir sur des casquettes qui bénéficient du soutien de certains artistes et DJ principalement du reggae dance-hall (Lieutenant, StoneKilla, MC Janik, DJ Killerz, Douks…)  


Notons aussi que, le 30 avril 2011, en Corée du Sud, la Martinique est devenue membre associé de la Fédération mondiale de Taekwondo, lors de la 22e assemblée générale de cette association. Elle est désormais reconnue comme une nation sportive à part entière, avec ses propres couleurs, qui intègrent le rouge-vert-noir. Elle collabore, sur un pied d'égalité avec la Fédération française. Elle a participé à ce jour à des championnats panaméricains et à des championnats du monde de la discipline.           (Éléments recueillis après débat)